Autour de l'ouvrage "Le soin des choses. Politiques de la maintenance" Jérôme Denis et David Pontille (2022)
Résumé de l'ouvrage
Qu'ont en commun une chaudière, une voiture, un panneau de signalétique, un smartphone, une cathédrale, une œuvre d'art, un satellite, un lave-linge, un pont, une horloge, un serveur informatique, le corps d'un illustre homme d'État, un tracteur ? Presque rien, si ce n'est qu'aucune de ces choses, petite ou grande, précieuse ou banale, ne perdure sans une forme d'entretien. Tout objet s'use, se dégrade, finit par se casser, voire par disparaître. Pour autant, mesure-t-on bien l'importance de la maintenance ? Contrepoint de l'obsession contemporaine pour l'innovation, moins spectaculaire que l'acte singulier de la réparation, cet art délicat de faire durer les choses n'est que très rarement porté à notre attention.
Ce livre est une invitation à décentrer le regard en mettant au premier plan la maintenance et celles et ceux qui l'accomplissent. En suivant le fil de différentes histoires, ses auteurs décrivent les subtilités du " soin des choses " pour en souligner les enjeux éthiques et la portée politique. Parce que s'y cultive une attention sensible à la fragilité et que s'y invente au jour le jour une diplomatie matérielle qui résiste au rythme effréné de l'obsolescence programmée et de la surconsommation, la maintenance dessine les contours d'un monde à l'écart des prétentions de la toute-puissance des humains et de l'autonomie technologique. Un monde où se déploient des formes d'attachement aux choses bien moins triviales que l'on pourrait l'imaginer. En savoir plus
L'intervenant mettra en lien cet ouvrage avec ses travaux sur le travail de care et de maintenance des bâtiments d'habitation collectifs en France et en Belgique, en interrogeant en quoi les études infrastructurelles offrent un cadre d'analyse aux processus d'assignation au travail de soutien de la vie quotidienne et aux rapports de pouvoir qui en résultent.
Résumé du séminaire
Il y a déjà presque deux décennies, Bruno Latour et Albena Yaneva proposaient d’analyser les bâtiments « en partant du point de vue de la fourmi » et en s’attachant à démanteler « l’idée désespérément statique » des bâtiments ». A partir d’un jeu de mots sur la théorie de l’acteur-réseau (Actor-network theory – ANT en anglais), il s’agissait pour eux de les voir plutôt « en tant que séries de transformations » qui font s’enchevêtrer temporairement les flux d’acteurs humains et non humains, les qualités changeantes des matériaux, les compétences sociotechniques, les créativités autant que les politiques de régulations diverses (Ibid. : 80). Cimentées autour des mêmes fondements théoriques, les recherches sur les infrastructures – qu’elles concernent des objets aussi divers que des tunnels, des ponts et constructions autoroutières, ou encore des câbles, des bâtiments publics et privés ou les infrastructures numériques – ont en commun de mettre en lumière et d’interroger le fonctionnement des dispositifs matériels, politiques et sociotechniques le plus souvent invisibilisés qui rendent possible notre quotidien.
La question des infrastructures, si elle n’est pas récente dans le monde anglo-saxon, est un objet de recherche qui reste encore peu développé dans les études de sciences sociales en langue française. Il nous semble pourtant qu’elles le potentiel de rénover les études urbaines, l’anthropologie et la sociologie des techniques et de créer des liens avec l’architecture, les STS, la géographie urbaine et l’écologie. Nous nous proposons donc, par le biais de ce séminaire de lecture, d’explorer, découvrir, redécouvrir, et mettre en lien des textes qui nous semblent importants de ce champ d’étude afin d’échanger de manière conviviale autour de leurs résonances avec nos propres terrains et ceux des auditeurs. Ce séminaire est aussi destiné à soutenir la création d’un réseau de collègues intéressé·es par ces questions. En savoir plus
Organisateurs
Luisa Arango (Sage), Marie Durand (LinCS), Romane Joly (Sage) et Benjamin Leclercq (LinCS)
Inscription pour la séance en présentiel et en distanciel